Des chercheurs travaillant pour Google affirment que leur ordinateur quantique a effectué des calculs que le plus puissant des supercalculateurs réaliserait en 10 000 ans. Une prouesse qui change tout, et rien à la fois.
Et la suprématie quantique fut. Des chercheurs travaillant pour Google affirment avoir atteint ce graal : démontrer qu’un processeur quantique est capable de résoudre une série de calculs informatiques hors de portée des supercalculateurs, même les plus puissants au monde. Il leur faudrait plus de 10 000 ans pour y parvenir.
Cette percée scientifique inédite a été décrite dans un article en ligne consulté par le Financial Times, vendredi 20 septembre, qui a ensuite été rapidement ôté du Web. Une disparition qui semble indiquer que la publication initiale a été une erreur ou qu’il s’agit d’un embargo qui n’a pas été respecté.
Des tâches plus complexes effectuées plus rapidement
Mais plusieurs copies de ce qui semble être l’article original sont apparues sur Internet depuis une semaine sans que les chercheurs de Google n’en confirment l’authenticité. Plusieurs spécialistes de l’informatique quantique interrogés par France 24 estiment que les résultats consultables apparaissent sérieux et scientifiquement convaincants.
"Si cette démonstration de la suprématie quantique venait à être confirmée, c’est remarquable car c’est une étape importante sur la route pour créer un ordinateur quantique", reconnaît Iordanis Kerenidis, chercheur à l’Institut de recherche en informatique fondamentale (Irif) du CNRS, contacté par France 24. Les promesses de l’ordinateur quantique sont nombreuses : effectuer des tâches plus complexes et beaucoup plus rapidement qu'une machine traditionnelle. Et les champs d’application sont multiples : recherche médicale (développement de nouvelles molécules pour les médicaments), optimisation du trafic routier, intelligence artificielle, etc. Un ordinateur quantique performant devrait même être capable de craquer tous les codes qu’on utilise au quotidien, que ce soit pour chiffrer les communications électroniques ou protéger les données sensibles.
Mais jusqu’à présent, "les ordinateurs traditionnels étaient capables d’effectuer toutes les tâches qui ont été soumises à une machine quantique", rappelle Frédéric Magniez, directeur de l’Irif, contacté par France 24. Les résultats de travaux de chercheurs de Google changent la donne : leur bête de course quantique a réussi en quelques minutes seulement à effectuer une tâche qui prendrait plusieurs dizaines de siècles au plus puissant des supercalculateurs de la Nasa, soulignent les auteurs de l’article. Ce qui revient à dire qu’avec "la technologie actuelle, cet exercice est impossible à reproduire", résume Frédéric Magniez.
Avoir réussi à franchir le mur de la suprématie quantique n’est cependant qu’un premier pas. D’abord, parce que la tâche soumise à cette superpuissance de calcul "a été spécifiquement conçue pour démontrer le concept de suprématie quantique et n’a pas d’application concrète", souligne Iordanis Kerenidis. D’après les chercheurs interrogés, la prochaine étape est de répliquer cette prouesse avec une tâche "utile", comme, par exemple, modéliser une molécule pour des nouveaux médicaments.
Des profits à la clé ?
Pour y parvenir, il faudra peut-être aussi une machine plus puissante que celle utilisée par les chercheurs de Google. Ces derniers ont eu recours à un calculateur doté d’un processeur équipé d’une cinquantaine de qubits, qui sont l’équivalent dans le monde quantique des bits traditionnels de nos ordinateurs actuels. "Ce que ces chercheurs ont utilisé est un petit ordinateur quantique", reconnaît Sébastien Tanzilli, chargé de mission technologies quantiques à l’Institut de physique (INP) du CNRS, contacté par France 24.
Ce n’est pas ce type de calculateur qui pourrait, par exemple, mettre à mal les systèmes de cryptographie actuels, obligeant le monde à repenser toute la sécurité informatique. Pour ce faire, il faudrait un ordinateur quantique doté de dizaines, voire centraines de milliers de qubits. Et "malgré les progrès technologiques réels, on ne sait pas quand un tel ordinateur sera développé, ni même s’il existera un jour", assure Frédéric Magniez.
Si Google et IBM cherchent à le développer, ce n’est pas que pour les beaux yeux de la science. "Dans un premier temps, il ne pourra pas y avoir beaucoup de calculateurs quantiques, car c’est cher et difficile à faire. Donc celui qui en disposera de quelques-uns pourra les mettre dans le 'cloud' et louer leurs services à des clients qui auront besoin de toute cette puissance de calcul", explique Iordanis Kerenidis. Des clients aux poches bien remplies comme les laboratoires pharmaceutiques qui l’utiliseraient pour leurs recherches, des banques pour des questions de sécurité informatique ou encore des grandes villes désireuses de mieux gérer leur trafic routier.
Même si Google est probablement motivé par l’appât du gain, leur démonstration de la suprématie quantique est bénéfique pour toute la communauté, estiment les chercheurs interrogés. "Si on ne parvenait pas à franchir cette étape, cela aurait rendu plus difficile la recherche de financement auprès des industriels. Cela devrait également motiver les chercheurs à poursuivre dans cette voie", estime Iordanis Kerenidis. Pour Frédéric Magniez, c’est toute la filière qui gagne en "crédibilité".
Author: Kimberly Holt
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